Journées d'études : Colonial / Décolonial
Entrée libre
Comment collectionner l’objet extra-occidental ? Comment l’exposer aujourd’hui ? journées d’études avec l’Université Jean-Jaurès de Toulouse sous la direction d’Evelyne Toussaint et d’Annabelle Ténèze, dans le cadre de l’exposition "Daniel Spoerri, les dadas des deux Daniel".
Ces rencontres constituent le deuxième volet d’un cycle entrepris avec la journée d’étude "Art & condition postcoloniale. Sortir du malentendu" qui s’est tenue le 25 avril 2016 dans l’auditorium des Abattoirs à Toulouse.
S’inscrivant dans les travaux de l’atelier "Productions artistiques, productions théoriques", thématique 3 ("CRÉATION – PRODUCTION. Arts, industries, marchés, territoires") , elles constituent le volet scientifique d’une grande exposition, "Daniel Spoerri : les dadas des deux Daniel", commémorant les 40 ans du Centre Georges Pompidou, conçue autour de la donation de la collection Daniel Cordier, en dépôt aux Abattoirs à Toulouse, réunissant collections "ethnographique" et œuvres d’art moderne et contemporain.
Des théoriciens, des professionnels des musées et des artistes ont entrepris, depuis plusieurs décennies déjà, de réfléchir aux différentes voies de décolonisation des discours, des objets et des œuvres. C’est selon ces trois axes de réflexion que nous aborderons cette question, dans ses fondements et son actualité.
Déconstruire les discours
On sait l’emprise des représentations véhiculées par l’hégémonie occidentale sur des concepts et des notions (identité, autochtonie, interculturalité, race, métissage, migrations, cosmopolitisme, frontières…) régissant le discours de nombre de disciplines. Une telle perspective suscite de nombreux questionnements qui seront abordés par des représentants issus de chacun de ces champs disciplinaires, des institutions culturelles ou des mondes de l’art.
Comment l’anthropologie, l’histoire, la philosophie, les études littéraires, la psychanalyse ou l’histoire de l’art entreprennent-elles de décoloniser leur propre discours ?
À quels outils théoriques ces disciplines peuvent-elles faire appel, et pour soutenir quelles positions épistémologiques, éthiques, politiques et artistiques ? Quelle est la place, aujourd’hui, des études culturelles, subalternes et postcoloniales ? Quels sont les concepts émergents permettant de penser la contemporanéité et d’envisager l’avenir ? Pour quelles actions concrètes et lisibles par tous ?
Déconstruire les objets
Si la question politique du statut de l’objet est déjà présente en 1931 – lorsque les surréalistes diffusent le tract "Ne visitez pas l’Exposition coloniale" –, elle va resurgir très frontalement à l’occasion des "Magiciens de la Terre" en 1989, puis de l’ouverture du musée du Quai Branly – Jacques Chirac, celle-ci advenant dans un contexte où se diffusent des travaux de divers champs disciplinaires revisitant les concepts d’universalité, d’identité, d’autochtonie, de déterritorialisation ou d’emprise. L’opposition, aujourd’hui, reste vive entre les défenseurs de l’autonomie de l’objet (pour sa valeur esthétique, sensible, intemporelle et universelle), et ceux qui défendent l’impératif de sa contextualisation ethno-géographique (d’un point de vue scientifique et éthique).
Dans un contexte où s’imbriquent des points de vue scientifiques, anthropologiques, philosophiques, poétiques et politiques pour prôner la décolonisation de l’objet, où se déconstruisent et se réactivent sans cesse les fantômes qui en constituent l’état ou la narration, de nombreux musées occidentaux et non-occidentaux ont entrepris de décoloniser les dispositifs d’exposition de leurs collections coloniales. Maniant avec précaution les intitulés – car il n’est pas neutre de s’affirmer musée de civilisation ou d’ethnographie, tant ces termes sont désormais lourds de représentations –, ils s’interrogent sur les modalités de leur constitution, de leur inventaire, de leur mise en espace et de leur politique de diffusion
Décalages artistiques
Comment, des positions affichées par les artistes des avant-gardes du début du XXesiècle, aux postures d’artistes historiens/archivistes/ethnologues aujourd’hui, la production artistique s’inscrit-elle dans ces débats et questionnements ?
En d’autres termes, que pensent les artistes de toutes ces questions et comment cela se traduit-il dans leurs œuvres ?
Programme
La programmation fera alterner communications individuelles (20 à 30 minutes), échanges, et tables rondes. En fonction du nombre d’intervenants, des films pourront être projetés.
Intervenants actuellement confirmés, dont certains interviennent en duo ou sous forme de table ronde :
- Hourya Bentouhami-Molino, maître de conférences en philosophie, Université Toulouse Jean Jaurès.
- Fabien Faure, maître de conférences en histoire de l’art contemporain, Aix-Marseille Université.
- Émilia Héry, docteur en histoire de l’art contemprain (Fascisme italien et colonies)
- Natacha Kaïl, Psychologue Clinicienne et Interculturelle, Chargée d'enseignement - Université Jean Jaurès.
- Émilie Kassentini, étudiante en M2 histoire de l’art contemporain, Université Toulouse Jean Jaurès.
- Elodie Lebeau, doctorante en histoire de l’art contemporain, Université Toulouse Jean Jaurès.
- Éric Michaux, directeur d’études, E.H.E.S.S, Paris.
- Jean Nayrolles, professeur d’histoire de l’art contemporain, Université Toulouse Jean Jaurès.
- Zahia Rahmani, responsable de l’axe Mondialisation à l’INHA.
- Samir Ramdani, artiste.
- Valentin Rodriguez, conservateur, Abattoirs Toulouse.
- Kevin Rouillard, artiste.
- Annabelle Ténèze, directrice des Abattoirs, musée d’art moderne et contemporain de la ville de Toulouse et FRAC Midi-Pyrénées.
- Evelyne Toussaint, professeur d’histoire de l’art contemporain, Université Toulouse Jean Jaurès.
- Sterlin Ulysse, doctorant en histoire de l’art contemporain, Université Toulouse Jean Jaurès.
Jeudi 20 avril
9 h 30 Accueil des participants
10 h – 10 h 15 Evelyne Toussaint, introduction aux rencontres
10 h 15 – 11 h Zahia Rahmani, écrivain, responsable du domaine Mondialisation à l’INHA
Qu’est-ce qu’une « lecture appliquée » selon Edward Said ?
11 h – 11 h 45 Natacha Kaïl, Psychologue, UT2J
Division subjective, division coloniale : comme pas deux !
11 h 45 – 12 h 30 Hourya Bentouhami-Molino, MC en philosophie, UT2J
Esthétique de l’archive coloniale : comment réparer les mémoires ?
12 h 30 – 14 h : Déjeuner
14 h – 14 h 45 Éric Michaud, directeur d’études, E.H.E.S.S, Paris
Sur la provenance « ethnique » des objets d’art (18e - 21e siècles)
14 h 45 – 15 h 30 Fabien Faure, MC en histoire de l’art contemporain, Aix-Marseille Université
La conversion des fétiches et l’antidote postcolonial
15 h 30 – 16 h Émilie Kassentini, médiatrice MuCEM, étudiante UT2J
Pour ou contre une lecture artistique de l’objet ethnologique
16 h – 16 h 15 Pause
16 h 15 – 17 h Table ronde avec les artistes Fatima Mazmouz et Samir Ramdani
17 h – 17 h 30 Visite des expositions
Vendredi 21 avril
9 h 30 – 10 h 15 Jean Nayrolles, PR en histoire de l’art contemporain, UT2J
Le sacré dans les arts sauvages : un enjeu culturel pour les Modernes
10 h 15 – 11 h Annabelle Ténèze, conservatrice du patrimoine, directrice des Abattoirs
Kent Monkman : décoloniser le western.
11 h – 11 h 45 Fabiana Souza, artiste, doctorante université Paris 8
Réactualiser l’archive, réécrire l’histoire : des pratiques artistiques décoloniales
11 h 45 – 12 h 30 Sterlin Ulysse, docteur en Etudes Ibéro-américaines
La problématique de la réception de la sculpture en Haïti : les Bizango, de l’objet rituel à objet d’art
12 h 30 – 14 h : Déjeuner
14 h – 14 h 30 Jean Deilhes, enseignant UT2J et ESPE Toulouse
Le Fleuve (1950) de Jean Renoir : un film « aux Indes »
14 h 30 – 15 h Elodie Lebeau, doctorante en histoire de l’art contemporain, UT2J
Décoloniser l’histoire de l’Indonésie. Lidwien van de Ven
15 h – 15 h 30 Émilia Héry, docteur en histoire de l’art, HiCSA, Paris 1
« Not a ‘nigga’, not a negro, but a Negus ». Art contemporain et colonialisme italien
15 h 30 - Débat et clôture
Responsables scientifiques
Evelyne Toussaint et Jean Nayrolles - Professeurs d’histoire de l’art contemporain, Université Toulouse Jean Jaurès (UT2J) ; Annabelle Ténèze - Directrice des Abattoirs, musée d’art moderne et contemporain de la ville de Toulouse et FRAC Midi-Pyrénées ; Zahia Rahmani - Responsable du domaine de recherche "Art et mondialisation" à l’Institut national d’histoire de l’art
En partenariat avec l'université Toulouse Jean Jaurès