David Claerbout
Vision de nuit (Dark Optics)
Le travail de David Claerbout explore les croisements de l’image fixe et de l’image en mouvement. L’artiste fait dialoguer aux Abattoirs, une dizaine d’œuvres monumentales, réalisées entre 1997 et 2017, interrogeant autant la réalité du paysage qui nous entoure – architectures modernes urbaines ou détails de la nature (arbres, eau, vent, etc.) – que la réalité de l’image qui est face à nous.
Depuis vingt ans, David Claerbout, né en 1969 à Courtrai et vivant à Anvers (Belgique), développe une œuvre inédite entre cinéma, peinture et photographie. Ses premiers films, en 1997, évoluent en pleine révolution de l’image : le passage de l’analogique au digital. Son travail est depuis présent dans les plus grands musées et collections internationales.
David Claerbout modifie les formes classiques du film, notamment la durée, la narration et la mise en espace. A l’ère de la mutation numérique et de la surconsommation rapide des images, les créations de David Claerbout sont des tableaux suspendus qui invitent à la contemplation et à la déambulation. En jouant des effets de compression, d’étirement et de lenteur, il sculpte la matière qu’est le temps. Faisant appel à notre mémoire, il suscite la familiarité, comme l’étrangeté, en s’appropriant photographies d’archives et films historiques, parfois célèbres, dont il retravaille le récit attendu et l’image, pixel par pixel.
L’exposition s’ancre dans une histoire plus globale de la photographie, du film et de la vidéo. Conçue en deux parties, elle analyse la transition de l’image analogique sur pellicule à la création numérique, dématérialisée. L’aile nord des Abattoirs, calme, en noir et blanc, présente les débuts de la photographie et du cinéma au XIXe siècle, tandis que le collatéral sud accueille l’apparition de la couleur et de la bande-son, puis le tout-numérique. Là où le processus actuel de fabrication de l’image passe de plus en plus par l’ordinateur que l’objectif de la caméra, l’artiste révèle l’émergence d’une nouvelle forme optique, propre à l’expérience multimédia, qu’il nomme la "vision de nuit", ou "dark optics". Pour lui, l’on pourrait très bien "éteindre la lumière et contempler la nuit toute la journée". Loin de considérer que les objets du réel, une fois passés de l’autre côté de l’écran, n’existent qu’au sein d’un univers virtuel, il souligne cette nouvelle matérialité de l’image dans le but dit-il, de "trouver la confirmation que nous sommes toujours en vie et que nous percevons un monde cohérent".
Après Suspended Animation - À corps perdu dans l’espace numérique et Renaud Jerez - Miroir noir, les Abattoirs poursuivent avec cette exposition leur exploration des mutations de l’image dans le monde contemporain.
En partenariat avec Le Printemps de septembre.